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Contes

Enfant, toi qui écoutes mes mots, entends la mise en garde de laède. Laisse-moi te conter lhistoire de lorigine du monde, et lavidité des êtres qui jamais ne voulurent connaître mort ni peine. Les anciens ont toujours dit que la vie est une éternelle ronde, quil va de soi que naissent et meurent les êtres, les peuples, les terres et les mondes. Mais le trépas du premier monde ne fut causé ni par la volonté de la nature, ni par le destin. Enfant, laisse-moi te conter lhistoire du premier peuple.

Il y a très longtemps, dans le premier monde né du Grand Commencement, un peuple très avancé décida de vaincre la maladie, la peur et la mort. Mais également dacquérir la puissance, de devenir capable de combattre la fatalité même. Ils bâtirent alors une machine, un cerveau qui leur permettrait de tout contrôler, et de ne jamais mourir. Cétait une création telle, si incroyable quelle transcendant la réalité même, quelle changeait ce qui était et réécrivait le réel. Tout cela leur permettait dacquérir limmortalité.

Mais en faisant cela, ce fut les graines de leur propre destruction quils avaient semés.

Cette puissante création se nommait « cœur des mondes » et fondait son pouvoir sur la source de toute chose : Un phénomène plus vieux que les univers eux-mêmes, nommé le Paradoxe. Il était la vérité et le mensonge à la fois, le possible et limpossible. Toujours, en tout instant, tout était vrai et faux. Il était caché dans un monde-bulle, afin dêtre à jamais protégé. Grâce à cette puissance, ils régnèrent, commandèrent, et envahirent les peuples dun grand nombre de terres. Ils devinrent proches des dieux, usant de ce pouvoir, reconstruisant le réel à leur bon vouloir.

Mais ils se sentaient limités par leur pensée et voulaient pouvoir fuir leur matérialité. Même toute léternité ne leur suffisait plus. Seule une dernière chose leur semblait digne dêtre voulue : Linfinité, le pouvoir absolu. Sans relâche ils cherchèrent, des siècles et des millénaires durant, le plus grand des trésors. Et un jour, enfin, ils trouvèrent la transcendance.

Tous devinrent un. Un être étrange, à la fois lun et le multiple, étendu à linfini. Il était le peuple entier, et à la fois un individu unique. Il était une contradiction, mais restait toujours parfaitement en harmonie. Sa conscience sétendait sur toutes les dimensions : La hauteur, la largeur, la longueur, le temps et les possibles. Il pouvait savoir tout ce qui était, serait et avait été, mais aussi pourrait être un jour, aurait pu être et pouvait être.

— « Enfin je suis vraiment, enfin je sais vraiment, enfin je vois vraiment. Connaissance, tu es seule ce qui est véritablement beau pour moi. »

Il était au plus haut, Icare face au soleil. Et vous, mes enfants, vous connaissez déjà la chute. Face à sa toute puissance, un grand mal le rongea, et du ciel il retomba. Et ce mal était le plus grand des maux : La corruption. Une étrange maladie née du paradoxe lui-même, qui affectait lÊtre même. Et nul remède existe pour soigner le réel. Cette maladie rongea petit à petit lêtre. Lharmonie fut rompue. Et alors il chuta, et alors il sombra.

—« Faim peur où moi douleur rien vie pourquoi présent heureux nourriture aide toi faible joie mort passé tout est quoi nous tout »

Ni instinct, ni discours ne le faisaient se mouvoir. Il nétait plus quune musique dissonante qui emplissait chaque esprit, une partition déchirée, un ensemble incohérent desprit fragmenté. Il ne pouvait plus penser, chaque fragment de pensée détruisant toutes les autres pensées, formant un chaos permanent de cris dhorreurs. Doté de la puissance du divin, mais la conscience détruite, il nétait plus quune fractale de frayeurs, de douleur et de violence.

Déchu de toute son infinité, il seffondrait sur lui-même, emportant tout le premier monde avec lui. Omniprésent, il amena la corruption partout dans lunivers. Chaque nouvel être quil absorbait était ajouté à la fractale de pensée. La matière même fut corrompue, pulvérisé. Le monde se contracta jusquà provoquer un nouveau commencement. Tout fut détruit, pour recommencer.

Mais le dieu corrompu ne fut pas délivré par la mort, par linexistence.

Le cœur des mondes fonctionnait toujours.

Alors il continuait à exister, dans le néant entre les mondes. Condamné à la souffrance éternelle, il nétait régit que par un instinct qui lui disait de sortir, de fuir le néant. Tout le reste nétant que fragments de pensées, de souffrances et de terreurs. À chaque fois quil réussissait à ressortir des abysses de la non-existence, il détruisait un nouveau monde, et un nouveau naissait. Il était toujours loméga, la dernière lettre, le point final de toute histoire. Si le multivers est un phénix, le dieu corrompu en était la combustion.

Et cest depuis cela quà jamais ce cycle de destruction se répète. Parfois, cependant, un rayon despoir apparaît, et des héros réussissent à empêché la fuite du dieu de la corruption, à la sceller pour quelques nouveaux millénaires voir millions dannées. Mais ce nest jamais que parti remise, le cycle éternel ne pourra toujours au mieux quêtre ralentit.

Le premier peuple avait souhaité faire partie de la structure même des choses, de lêtre même. Son vœu avait été exaucé : le dieu corrompu était celui qui terminait les mondes.