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Kazhnuz 2020-05-13 13:24:32 +02:00
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title: Les mystères
date: 2017/11/13 21:56:00
categories: Pensées
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Quand jétais petit, aucun lieu ne me semblait plus mystérieux quune bibliothèque. Un espace avec ses rituels étranges, tel que garder le silence. Un lieu ou tout pouvait se trouver, nimporte quel histoire pouvait se cacher au tournant dun ouvrage. Ces lieux étaient comme des temples, non pas uniquement du savoir, mais également des temples des histoires, des lieux et des mondes à découvrir.
Quand jouvrais un livre, je me demandais toujours : comment quelquun a pu écrire ça. Comment pouvait-il savoir que les mots étaient les bons, comment pouvait-il réussir à écrire des choses aussi belles. Est-ce que chaque phrase était fabriquée, façonnée dans largile des mots et des figures de style afin de construire un ensemble ou chaque sonorité et lettre tomberait à la bonne place ? Ou était-ce un talent inné, les phrases naissaient toutes seules, naissant comme une mélodie harmonieuse de caractères couchés sur du papier. Jerrais dans les bibliothèques à la recherche dune réponse à cette question.
Comment une histoire pouvait-elle être faite ? Où trouvaient-ils des idées originales, comment pouvait-elle naître dun coup dans leurs esprits fertiles. Nayant point la clef de linspiration, la porte de la compréhension de ce mystère semblait rester irrémédiablement close. Comme si le secret des livres que jadorais dévoré semblait impossible à découvrir par la simple lecture. Cest ainsi que lenvie décrire naquit. Comment réussir à faire pareil. Comment réussir à faire des histoires. Était-ce des jeux ? Est-ce quon jouait des personnages, puis on couchait ses jeux sur du papier ? Était-ce des plans bien suivi ? Était-ce un univers dans lequel on vivait un peu ?
Mais quand on passe de lautre côté du miroir, ny a-t-il pas un risque de perdre le mystère ? Ce qui semble impossible devient possible, et le pouvoir mystérieux de créer devient narratologie, construction du conte et théories du récit. La fulgurance de la naissance dune histoire devient clapotis mécanique dun clavier. Est-ce que le transformer en méthodologie na-t-il pas tué le mystère ? Les symboles devenus visibles nont-ils pas érigé un mur bloquant limmersion dans le récit ? Lorsquon perçoit des structures et des formes dans un récit, lorsque lexpérience nous permet de prédire ce qui va se passer, est-ce que nous navons pas perdu un peu de notre enfance, du jeune nous qui aimait dévorer les livres avec la naïveté de la découverte ? La désillusion du récit nest-elle pas la perte dune partie de la magie des livres ? Et pire encore, nest-ce pas la fermeture partielle de certains mondes de récits, remplacés par des microscopes et des fiches danalyses ? Peut-on encore errer dans une bibliothèque, alors ?
Cest ainsi que lon part alors sur une nouvelle route. Après une quête pour remplacer le savoir par le mystère, on cherche le mystère au-delà du savoir. Récit quon a jamais lu, dans un style tout nouveau. Récit dont on pensait déjà tout connaître, observés dun œil nouveau. Peut-être que la recherche est-elle avant tout un amour du mystère.

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title: Swift
date: 2017/10/02 09:45:00
categories: Pensées
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Quand jétais petit, jai régulièrement fait ce même cauchemar. Je courais, jessayais déviter quelque chose, mais je ne faisais quallez de moins en moins vite. La lenteur me prenait, et javais limpression que tout ce que je voyais au loin, tous les moyens de fuite étaient inaccessibles. Peut-être était-ce pour cela que je naimais pas trop courir, peut-être était-ce juste de la paresse.
Cependant, la vitesse gardait quelque chose dattirant, malgré les faibles capacités de mes jambes. Être rapide, ce nétait pas simplement être dans une grosse voiture et jouer de laccélérateur, non. Ce nétait non plus un intérêt pour les sportifs, qui à travers entraînements intensifs et produits chimiques avaient fait de leur vitesse leur métier. Cétait rendre accessible ce qui était trop loin. Cétait également la souplesse et la fluidité. Ce nétait pas temps la vitesse dune fusée Ariane que ces mouvements souples et rapides qui en devenaient presque invisibles. Était-ce une attirance personnelle, où faisait-ce partie de ces nombreux fantasmes de lenfance ?
Quand on est enfant, on court tout le temps. Il faut dire quon aime pas trop attendre. Courir, être rapide, cest aussi le moyen de baisser la terrible, la funeste attente. On traîne des pieds pour éviter ce quon ne veut pas, mais on court vers ce que lon veut. Même si ce nétait pas trop ce que je préférais, il marrivait de courir dans tous les sens quand jattendais quelque chose. On nous dit dattendre cinq minutes cest-à-dire une éternité. Mais nous, ce quon veut, cest la suite. Mais ce nétait pas que de limpatience. Cétait aussi des sensations.
Dans la voiture, jaimais par-dessus tout ouvrir la vitre. Je sentais le vent sengouffrer, ébouriffer mes cheveux. Dun seul coup, je nétais plus dans un véhicule incroyablement plus rapide que ma marche a pied, mais je faisais moi-même partie de cette sensation. Je regardais dehors, sur le côté de la route. Jimaginais quelquun avançait sur ces obstacles, ce jeu classique de lenfance. Chaque élément du décor faisait alors partie de cette chorégraphie fantasmée, de ce ballet de mouvements imaginaires dun personnage inexistant à travers des obstacles physiques. Un saut pour éviter un rocher, un tournoiement habile pour passer à travers une branche. Des flexions successives autour des poteaux qui défilaient à toute vitesse. À travers, ce jeu classique de lenfance, cétait ce même attrait des mouvements rapides et souples, de la vitesse qui jouait.
Et le mieux, cétait davoir son propre véhicule. Sallonger sur une chaise de bureau que dis-je, dans un fier et somptueux char et courir pour se laisser emporter par linertie. On devenait dun coup des fusées, capable de parcourir des distances incroyables, tels quun couloir et quelques salles. Se mettre sur un tourniquet, sy accrocher pendant que des camarades le tournait. Dans ces moments, on était grisé par la vitesse. Dans ces moments, des sensations que lon ne rencontrait pas dans la « vraie vie ».
Peut-être était-ce aussi ça : un des nombreux échappatoires que nos jeux et nos fantaisies nous offraient face à cette affliction quétait le quotidien. Un de ces moments où il nétait plus question dalgèbre et de grammaire, de questions compliquées « réservées aux adultes » mais dexpériences et de plaisirs.

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title: Le chemin des souvenirs
date: 2017/11/25 22:22:22
categories: Pensées
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Un vieux téléphone Nokia pété. Un vieux souvenir du lycée. Retrouvé dans une caisse en cherchant un câble Ethernet. Je ne sais pas depuis combien de temps je lai vu. Il ne marche pas, et même dun point de vue technique cest un vieil appareil sous une antique version de Symbian, un système tellement ancien quil doit être vérolé de toute partie. Des ordinateurs cassé. Rien a en faire à présent. Mais offerts par des amis. Offerts par mon père. Une carte de transport périmée qui ne marche quà Rennes. Mon vieux sac cassé que javais en cours là-bas. Pourquoi garder tout cela ? Je suis incapable de jeter quoi que ce soit dans tout cela.
Ces objets nont plus aucune utilité objective. Ils prennent la poussière et ne sont regardé que lorsque je me sens mélancolique. Ai-je peur de passer à autre chose dans certains cas, de me dire que ces parties de ma vie soit finies ? Oui et non. Ils sont une partie de moi. Une piste vers le passé. Un souvenir dune époque de ma vie, des tickets de métro dun voyage à Paris, des souvenirs de mes ex, de mes amis que jai perdu à cause de léloignement, de mes conneries ou dune faucheuse de merde… Et beaucoup de souvenirs de mon père, des photos, des écrits de souvenirs que jai avec lui. Tout ces objets, du plus au moins cher, sont ces pistes. Des pistes vers des fragments de vie et de temps qui existent quelque part en moi, qui existe quelque part dans le lieu ou je vis. Vers ce qui a été, vers ce qui aurait pû être. Ils sont le rappel quil existe quelque chose avant aujourdhui, ils sont les souvenirs de tous ces instants, toutes ces personnes qui ont participé à me construire.
Le passé est un chemin, et ces objets en sont la piste.
Je commence à prendre la route sur ce chemin sinueux. Chaque étape est une nouvelle période de ma vie. Le collège, le lycée, la faq, lESPE. Différent établissement scolaire, différentes villes, différents groupes damis. Des amours. Des erreurs. Des ruptures. Des douleurs. Ne pas se voir sur la liste des admissibles à un concours. Des pertes. Une soirée ou je me suis mis mal. Le deuil. La dépression, cette ombre qui nous ronge et attend toujours de revenir. Une engueulade pour me remettre les idées au clair. Un concert dun groupe de lycée. Une amie qui maccompagne quand je suis allé me faire percer loreille. Cette soirée ou on sest maté des vieux nanars. Des moments intimes, d'égarements, où l'on s'oublie et baisse nos barrières. Des longues discussions par SMS ou par messagerie instantanée, des amitiés qui existent et durent malgré les kilomètres, malgré mes phases de silence. Des jeux dans des escalators avec mon frère tandis que mes parents travaillaient pour un festival de science-fiction. Des rencontre qui nont pas duré, mais dont le souvenir lui a duré. Ma famille, mes amis, ceux que je ne peux plus revoir, ceux que jai peur de revoir, ceux que je ne veux pas revoir.
Chacune des étapes est une nouvelle rencontre, un nouveau souvenir qui sommeillait et qui se réveille brutalement. Comme si, plongé dans le présent, on en avait jusquà oublié doù on venait. Certaines étapes sont des pièges, des souvenirs trop mauvais pour être revisité. Des boites de pandore que je nouvrirais pas. Je me hâte alors dans les bois, vers dautres souvenirs plus petit mais qui ne piégeront pas. Dautres étapes sont douloureuse parce quelles rappellent les erreurs, les fautes. Ce que je naurais pas dû faire. Alors là la question se pose : y aller, ou refuser dy aller ? Parfois, nous voulons fuir les souvenirs qui nous font honte, ceux où on se dit qu'à un moment, on a été une mauvaise personne. Mais ces souvenirs sont important, parce qu'ils faut les comprendre pour ne pas recommencer ces fautes. Il faut alors respirer un grand coup, et ouvrir la porte de létape.
Mais la piste de la mémoire peut elle-même devenir un piège. Nous pouvons alors nous complaire de marcher et remarcher toujours dans ces sentiers mnémonique. Nous pouvons nous perdre alors dans ce labyrinthe au murs de miel quest la nostalgie. On continue de vivre dans la piste de la mémoire, perdant lautre piste, toute aussi importante : celle du présent. Il faut savoir entrer dans le passer pour le comprendre, mais en sortir pour pouvoir vivre.
Je range ces objets dans leur boite. Ils en ressortiront, mais pour linstant, il est lheure dêtre dans le présent.